vendredi 4 juin 2010

Vu et approuvé/Jeffrey Lewis

Jeffrey Lewis,
au Glazart


Au départ, ce devait être un concert d'un "supergroupe", the Bundles, formé par Jeffrey Lewis et Kimya Dawson. Mais Kimya (ex Moldy Peaches) n'est pas venue et l'on ne sait pas pourquoi et l'on s'interroge (extinction de voix? excès de grenadine?) Du coup, c'est le frère de Lewis, Jack de son prénom, qui l'a remplacée : heureusement, lui aussi joue de la guitare et chante.

Un supergroupe, c'est un groupe composé de stars comme The Dead Weather avec le mec des Whites Stripes, la nana des Kills, un autre mec des Queens of the stone age, et puis un autre mec des Raconteurs. Et les Raconteurs aussi forment un "supergroupe" mais je m'égare...

Il y a une certaine ironie à se revendiquer "supergroupe" quand on s'appelle Jeffrey Lewis, car l'on appartient alors à un courant musical appelé anti-folk : comme son nom l'indique, c'est le contraire du folk mais ça y ressemble quand même un peu sinon on l'aurait pas mis dans le nom...Allez, je vous aide parce que je sens bien que vous êtes perdu : l'anti-folk reprend l'engagement du folk des années 60s quand les gens croyaient encore qu'une chanson pouvait changer le monde (Souvenez-vous des chansons engagées de Bob Dylan) sauf qu'il rajoute une bonne dose d'autodérision, d'authenticité, de naïveté même... Enfin, ce que je voulais dire c'est que Jeffrey Lewis et ses acolytes sont loin d'être des stars, il y a même très peu de monde pour venir les applaudir au Glazart.


Ces gens-là, en tant que descendants des très peu fréquentables punk, ils aiment bien prendre des drogues, comme le suggère le nom du premier album de Jeffrey Lewis : The last time I did acid I went insane...Et puis comme ce sont des gens qui aiment l'autodérision et l'humour décalé, on rigole à leurs concerts comme avec une bande de potes...Ils ne font pas de manière avec nous : Adam Green avait roulé une pelle à un jeune homme monté sur la scène, Jeffrey Lewis va vendre ses disques à 5 euros avant et après les concerts en buvant sa pinte...Point de prétention ici!
Et pour le concert alors ? Cela fut malheureusement vite expédié mais fut un condensé d'exaltation sauvage. Les anti-folkeux ont un sens de la mélodie imparable, avec généralement une rythmique basse-batterie incroyablement accrocheuse, qu'ils s'amusent à massacrer de leur voix faussement fluette, faussement cassée et que sais-je encore? Que n'iraient-ils pas inventer pour se démarquer des musiciens vendus à la pop et rester droit dans leurs bottes indie ? Mais oui, que feraient-ils ? Et bien, ils iraient déclamer des vers comme dans une prière adressée au dieu anti-folk, au hasard Daniel Johnston, en tournant les pages d'une bande dessinée qu'ils auraient confectionnée sur l'histoire et la décadence de la Rome antique, tel des prêtres nous contant les péripéties survenues dans les Evangiles. Amen...euh...Fuck off!

Lu et mitigé/Avec les pires intentions


Avec les pires intentions,
Alessandro Piperno


Aïe ! Encore une quatrième de couverture qui nous survend ce premier roman d’Alessandro Piperno en le décrivant comme « iconoclaste, provocateur, politiquement incorrect ». Certes, le romancier ne manque pas de talent mais ne mérite peut-être pas tous ces qualificatifs. J’ai bien aimé la galerie de portraits des Sonnino, une famille juive romaine et bourgeoise. Il y a Bepy, le patriarche flamboyant, qui a dilapidé toute la fortune familiale et qui a fait de nombreuses infidélités à sa femme, Teo, le fis cadet un peu trop porté sur la religion selon son père et qui part vivre en Israël, Luca, l’autre fils, albinos qui aime les affaires, les grosses voitures et les grandes marques…Il y a surtout Daniel, le petit-fils, narrateur de ce roman, adolescent terne et collectionneur de petite culotte…Mais une fois les portraits brossés – et certains passages sont redondants ce qui lassent à la fin- l’histoire vire à un scénario de la Boum légèrement érotisée qui pourrait s’intituler : Comment conquérir une fille que j’aime mais qui ne me voit que comme un bon copain ? Mmm, c’est tout de suite moins passionnant…


Une fois n’est pas coutume, voici une critique d’
Anne-Cécile Staman, une journaliste de Chronicart qui résume bien le roman :
"Indéniablement, Piperno a un sens aigu de la formule. Hélas, le brio clinquant s'accommode mal de la longueur, d'autant que la seconde partie du roman vire au mélo ironique. Le narrateur noircit des pages à raconter les historiettes d'une jeunesse aussi dorée que médiocre, et nous émoustille en retardant sans cesse la révélation du trauma post-pubère responsable de son naufrage annoncé. Alors on s'accroche, courageusement, dans l'espoir ultime de ressentir une bouffée d'empathie pour notre malheureux adolescent attardé. La déception n'en est que plus cruelle : en lieu et place d'une scène croustillante, il faudra se contenter d'un final à l'érotisme gentiment convenu. Avis aux amateurs de petite culotte et autre touche-pipi."
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