Un fils de l'Amérique,
Nelson Algren
Nelson Algren est connu en France pour avoir été l'amant de Simone de Beauvoir. Mais il mériterait qu'on s'attarde davantage sur son oeuvre que les spécialistes rangent aux côtés de Faulkner, pas moins.
Il restitue en tout cas magistralement la cruelle réalité des misérables, reprend leurs expressions crues, décrit leurs comportements douteux mais ne juge jamais cette "masse silencieuse". Le terme n'est pas choisi au hasard puisque l'auteur était communiste; ses idéaux se ressentent particulièrement dans la troisième partie du roman qui se déroule à Chicago : "Le maire lui-même faisait un peu de proxénétisme pour joindre les deux bouts : pour le compte de l'usine Chevrolet, pour la Standard Oil, ou de n'importe quelle pieuvre industrielle disposant des moyens de le payer. Et c'était ça qu'il était en train de faire trois pâtés de maisons plus loin. Il maquait cette vieille pute, le monde des affaires de Chicago, la fardant pour son dernier gros samedi soir. Le maire était un souteneur, il travaillait pour le compte de la Libre Entreprise."
Que dirait-il aujourd'hui alors que l'Amérique est en pleine récession de voir le président voler au secours des banques et de l'industrie automobile à grands renfort de millions de dollars? Un écrivain nous parlera peut-être bientôt de ces milliers d'Américains, endettés jusqu'au coup, victime de la crise des subprime, venir gonfler cette masse toujours silencieuse.
L'info en plus : Un fils de l'Amérique est le premier roman de Nelson Algren, écrit en 1935 pour 30 dollars par mois. Comme le livre n'a eu aucun succès à sa parution, l'auteur s'est abstenu d'écrire jusqu'en 1940.