Un fils de l'Amérique,
Nelson Algren
Cass McKay est un visage pas très reluisant de l'Amérique : fils d'un détraqué, frère d'un alcoolique, livré à lui-même. Né miséreux dans un trou paumé du Texas, Cass rejoint la horde de vagabonds qui prennent les trains d'assaut en espérant un jour meilleur. Comme tous ces "hobos", ces travailleurs itinérants que l'on croise aux Etats-Unis pendant la crise des années 30, Cass fréquente les soupes populaires, parfois les prostitués, parfois les prisons. Le hasard fait le reste : bonnes ou mauvais rencontres...Nelson Algren est connu en France pour avoir été l'amant de Simone de Beauvoir. Mais il mériterait qu'on s'attarde davantage sur son oeuvre que les spécialistes rangent aux côtés de Faulkner, pas moins.
Il restitue en tout cas magistralement la cruelle réalité des misérables, reprend leurs expressions crues, décrit leurs comportements douteux mais ne juge jamais cette "masse silencieuse". Le terme n'est pas choisi au hasard puisque l'auteur était communiste; ses idéaux se ressentent particulièrement dans la troisième partie du roman qui se déroule à Chicago : "Le maire lui-même faisait un peu de proxénétisme pour joindre les deux bouts : pour le compte de l'usine Chevrolet, pour la Standard Oil, ou de n'importe quelle pieuvre industrielle disposant des moyens de le payer. Et c'était ça qu'il était en train de faire trois pâtés de maisons plus loin. Il maquait cette vieille pute, le monde des affaires de Chicago, la fardant pour son dernier gros samedi soir. Le maire était un souteneur, il travaillait pour le compte de la Libre Entreprise."
Que dirait-il aujourd'hui alors que l'Amérique est en pleine récession de voir le président voler au secours des banques et de l'industrie automobile à grands renfort de millions de dollars? Un écrivain nous parlera peut-être bientôt de ces milliers d'Américains, endettés jusqu'au coup, victime de la crise des subprime, venir gonfler cette masse toujours silencieuse.
L'info en plus : Un fils de l'Amérique est le premier roman de Nelson Algren, écrit en 1935 pour 30 dollars par mois. Comme le livre n'a eu aucun succès à sa parution, l'auteur s'est abstenu d'écrire jusqu'en 1940.



















L'Italie que donne à voir et à entendre Matteo Garrone est loin de tous les clichés : la ville y est laide et sombre; la langue n'y est pas chantante mais chuintante. On est dans l'univers de la Camorra, sans artifices et sans anjoliveurs. C'est froid comme un documentaire avec ses visages anonymes, ses parcours croisés et similaires car quinconque approche de loin ou de près à la mafia en paye le prix. Mais on perd le fil dans ce film pas très structuré qui passe d'un endroit à un autre, d'un visage à un autre, sans but précis si n'est montrer la violence et la cruauté de la pieuvre qui tisse sa toile dans tous les strates de la société et dans tous les domaines (trafic de drogues, contrefaçons textiles, enfouissement de déchets toxiques).


















